MYTHOLOGIES

MYTHOLOGIES

1 Lugh(lou) époux de Deichtire père de Cúchulainn (koukoulin), fils adoptif de Tailtu (Maria Talentio), fils de Ethne (eyne-fille de Balor ) et de Cian (ki An - Fils de Dianchéacht et Eithne)

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Lugh, Lugh Lámhfada ou Lugaid ou Lugaidh ou Lonnansclech. Lugus, Teutates (Gaulle ) Lleu ( pays de Galles)

 

 

 En Irlande, Il est le successeur « perfectionné » de Dagda (« dieu bon ») qui figurait principalement les réussites de l’agriculture et des divers métiers artisanaux qui naissent de cette richesse agricole (et qui survivra quand même en Gaule sous le nom de Sucellos). Lug représente un stade plus avancé de la société celtique, un artisanat plus élaboré, et l’aspect intellectuel et spirituel d’une culture atteignant son apogée.

 

Il est le dieu lumineux, celui qui resplendit au cœur de l'été, sa fête est "l'assemblée de Lugh", Lugnasad.

Dieu inventeur de tous les arts et protecteur des marchands et des voyageurs. Il couvre les 3 fonctions (sacerdotale, guerrière et productive)

Il possède les capacités de tous les autres dieux. Il est donc "hors classe", se positionnant au-dessus d'eux. C'est un dieu belliqueux, violent, mais aussi bienfaisant, doué pour les opérations intellectuelles, artisanales et l'exercice de la médecine.

 

  Son ascendance justifie d'ailleurs cette ambivalence;

  • moitié sombre par sa mère,Ethlinn ou Ethne fille de Balor roi des Fomoire qui tue d'un regard de son oeil unique
  • moitié claire par son père Cian   Dieu du Soleil et fils de Diancécht le dieu médecin

  Il est l'union entre le ciel et la terre, la vie et la mort...

 

 Son arme symbolique est la lance (le javelot), il est musicien et sa harpe magique peut jouer tous les airs, il maitrise toutes les techniques, il acquiert la plénitude de son rôle en gagnant une partie du jeu d'échec contre Nuada, il prend alors possession des destinées du royaume et de l'univers.

 

 

  le nombre trois dans la culture celte exprime une idée de totalité temporelle, qui comprend le commencement, le développement et la fin de toute chose. Cette idée peut trouver une application dans la mythologie irlandaise. Parmi les ascendants de Lug, seuls ses parents et ses aïeux ont un rôle actif ; au-delà, nous n’avons quasiment que des personnages « fantômes », connus uniquement par leurs noms. La mythologie irlandaise se concentre donc sur trois générations :

 

la première avec Balor qui représente l’idée de commencement du monde, associé à un contexte hostile et sinistre ;

 

la seconde avec les Túatha Dé Danann qui marquent les prémices d’une société réglée ;

 

la troisième avec Lug qui achève l’organisation du monde. La triplicité temporelle reflèterait alors les trois âges de l’être humain :

 

le vieil âge (Balor),

la maturité (Dagda)

et la jeunesse (Lug). 

 

  La famille de Lugh:

Sa mère tient le rôle de personnifier la Souveraineté et/ou la terre dans son aspect fécondant et nourricier (Eithne, Rhiannon, Modron, Macha) ; son père est associé à la souveraineté religieuse et/ou dispose d’un pouvoir ithyphallique (Dagda, Gwydion, Pwyll, Mellt). L’identité du père a régulièrement été difficile à déterminer, aussi bien dans la littérature irlandaise que galloise. Nous pouvons alors nous demander s’il n’y a pas eu dans ces deux traditions une volonté délibérée de dissimuler son nom, qui n’aurait été connu que dans le milieu de la classe sacerdotale celtique.  

 

Le principal point de comparaison a été le thème des jumeaux. Régulièrement, le(s) frère(s) aîné(s) meure(nt) aussitôt alors que le plus jeune survit et connaît ensuite une existence glorieuse. À en juger par les couples Lleu-Dylan, Lug-ses frères et Corc Duibne-Cormac, les Celtes devaient opérer une claire distinction de leurs jumeaux mythiques, en plus du destin opposé, au contraire des Dioscures grecs et des Aśvin qui étaient quasi-indifférenciables.   L’autre thème souvent rencontré concerne l’association entre la famille de Lugus et le cheval. Ces rapports sont aussi proches que deux mères de ce dieu (Rhiannon et Macha) ont elles-mêmes assumé une forme chevaline. En outre, deux figures lugiennes (Pryderi et Cú Chulainn) ont eu un ou deux jumeaux-chevaux. Étant le fils et le frère de chevaux, nous pouvons nous demander si Lugus n’avait pas deux natures, l’une anthropomorphe et l’autre hippomorphe.  

 

 

 Ethlinn sa mère est fille de Balor le géant borgne chef des fomoires  à qui un druide avait prédit qu'il allait mourir des mains de son propre petit-fils. Balor enferma donc sa fille, Ethlinn, dans une tour de cristal. 
Cian, franchit la tour. Neuf mois plus tard, Ethlinn  donna naissance à trois garçons. Balor ordonna à ses serviteurs de noyer les nourrissons. mais un enfant, Lugh   survécut.
 

  Tailtiu ( Maia grecque) était la mère adoptive et la nourrice de Lugh.  fille du dernier grand monarque celte d’Irlande Mag Mor, « roi d’Espagne » et l’épouse du dernier roi des Fir BolgEochaid Mac Erc, dont le règne est réputé pour sa justice et sa prospérité. 

.Ayant survécu à la « Première Bataille de Mag Tured » qui voit la défaite des Fir Bolg par les Tuatha Dé Danann, elle devient la mère adoptive du dieu Lug.

Elle défriche la forêt de Breg, pour en faire une plaine cultivable, ce qui la fait mourir d’épuisement. 

Mais avant de mourir, elle fait une prophétie, une promesse : « Aussi longtemps qu’un prince me reconnaîtra, l’Irlande ne sera pas sans perfection de chant. » Autrement dit : « Aussi longtemps qu’on honorera ma mémoire, j’accorderai fertilité à la terre et aux hommes. »

À sa mort, Lugh organise des cérémonies en son honneur (Áenach Tailteann) lors de la fête de Lugnasad. »

La forêt de Breg fait place à un champ de trèfle, plante désormais emblématique.

Tailtiu est plus que seulement la mère adoptive de Lug, elle a tout le profil d'une grande déesse représentant un des aspects de la Terre-Mère. Ses racines selon toute évidence remontent au néolithique, à l'époque qui vit l'apparition de l'agriculture. Tailtiu fut la protectrice des premiers paysans. Elle protège les champs et le bétail. Sa force divine réside tout particulièrement dans les céréales. Au fur et à mesure que ces plantes grandissent, l'esprit de la déesse les habite. La céréale était identifiée à la grande Mère. La période de la moisson représentait ainsi logiquement la mort de la déesse, une mort donnant nourriture et abondance aux humains.

 

  Lugh et  Deichtire , la soeur (ou la fille) du roi Conchobar sont les parents de   Cúchulainn (« chien de Culann ») un des personnages les plus importants de la mythologie irlandaise dont la force physique, les pouvoirs magiques et l'aide de dieux en font un héros extraordinaire.

 

  Cuchulainn est l'archétypique de la vaillance. C'est le défenseur de la tribu, celui qui n'utilise des pouvoirs magiques que pour faire le bien de son peuple et combattre le mal. Comme bon nombre de héros, il sert d'intermédiaire entre les dieux et les humains.

Ainsi, c'est le principal héros des légendes du cycle d'Ulster.

Ainsi, il aurait vécu durant sa basse enfance un temps à la cour royale de Conchobar mac Nessa, à Emain Macha (ou Emuin Machae)  vers 300 après JC.

Même s'il est le fils de Lug, Cuchulainn n'est pas un dieu. Il s'agit plutôt d'une figure héroïque, un guerrier semi-divin doué d'une habileté, d'une force et d'une fureur peu communes :

une sorte d'Hercule celtique à l'existence glorieuse mais brève, car vouée à une fin tragique.

Cuchulainn est élevé à la façon des artistocrates celtiques. Ainsi, il est éduqué par son père adoptif le poèteAmairgin (ou Amorgen). L'historien Sencha lui enseigne la sagesse, Fergus l'art de la guerre, le druide Cathba la magie et tandis que les guerrières Aifa et Skatha (ou Scathach) lui offrent aussi leur savoir. Cette dernière deviendra d'ailleurs sa maitresse et lui donnera un fils, Conatt, qu'il tuera par mégarde au cours d'un combat.

Avec tous ces enseignements, Cuchulainn développe jusqu'à l'invraisemblable la folle fureur qui l'anime à la bataille, en l'obligeant à frapper aveuglément quiconque, ami ou ennemi, se trouvant à sa portée. En temps ordinaire, il diffère des autres physiquement. Ainsi, au lieu d'être grand, blond et barbu comme les siens, il est petit brun et imberbe. C'est en partie pour cette raison qu'il est parfois considéré comme un étranger. Au cours d'un combat, sa fureur est telle que son physique s'en trouve atteint. Ainsi, ses cheveux se dressent et une goutte de sang ou une étincelle apparaissent au bout de chaque mèche. Des flammes sortent de sa bouche. Une bosse de la taille d'un poing se forme alors sur son front. Un jet de sang noir sort du haut de son crâne et peut atteindre la hauteur du mât d'un grand navire. Un oeil est enfoncé dans son orbite tandis que l'autre devient gros et globuleux. Il brandit alors une lance barbelée, la gae bolga qui, dit-on, ne rate jamais sa cible. On dit aussi que pour le calmer, il faut le baigner dans trois bains successifs d'eau glacée.

Un jour, les dieux ordonnent de faire un choix. Il doit choisir entre une longue vie ou la renommée. Il opte pour la renommée, mais se trouve alors lié à une obligation permanante (geis) : il ne devra jamais passer devant un foyer sans en goûter la nourriture et ne jamais manger de viande de chien. Ainsi, il lui est prédit que son dernier acte sera, comme le premier, le meurtre d'un chien, et qu'alors il saura que sa mort est proche.

 

 La mort de Cuchulainn

 

Un jour, la reine Medb, n'ayant pas digéré sa défaite face à Cuchulainn lors de la Razzia de Cooley (voir ci-dessus), décide de s'attaquer de nouveau à lui. Elle s'aide cette fois de sorcières spécialement préparer pour le combattre. Dans des circonstances normales, Cuchulainn est invincible au combat, ce qui ne veut pas dire pour autant qu'il est invulnérable. Medb le sait. Ainsi, la veille avant la bataille, elle ordonne à ses sorcières de se métamorphoser, tandis que Cuchulainn déambule. Il s'arrête devant des personnes qui font rôtir un chien (en réalité, les sorcières). Il est alors obligé d'obéir à son geis et doit s'arrêter près du foyer pour goûter la nourriture. Malgrè l'autre interdiction du geis qui lui a été faite, il est contraint de manger un peu du chien. Immédiatement, ses pouvoirs diminuent. Au combat suivant, connu sous le nom de Grand Carnage ou Mag Muirthemne, il est trop faible et reçoit une blessure mortelle.


 Il décide alors d'aller se laver dans la rivière, et remarque une loutre, ou "chien d'eau" qui boit l'eau teintée de son sang. Il comprend alors qu'une fois encore, il est le jouet de son destin. En effet, il se rappelle que la prophétie est de tuer un chien au début de sa vie et avant sa mort. Le chien de Culann ayant déjà été tué, il comprend que sa dernière heure est proche. Pour mourir avec honneur, il s'attache à un pilier en pierre, et meurt ainsi debout. Ses ennemis plus tard, voient trois corneilles se percher sur sa tête. Tous savent alors que Morrigan, la déesse de la mort, est venue le chercher. Ils lui coupent donc la tête.
 

 
Maria Talantio était une déesse chtonienne, célébrée à Luginaissatis pour fêter la moisson, les récolte, et annoncer le début de l’automne.

L’assemblée de Lugus, dans la roue zodiacale, correspond à la saison des moissons où l’évolution printanière s’est achevée, et va laisser la place à l’involution automnale. Elle est un signe centripète comme la couleur bleue, qui va dépouiller la terre de son manteau de verdure, la dénuder, la dessécher. C’est le moment de la fête de Talantio, de la Mère.

« Tailtiu d’où vient le nom ? Ce n’est pas difficile. Tailtiu, fille de Magmor, femme d’Echad le rude, fils de Duach le sombre, c’est elle qui fit la forteresse des Otages à Tara. Elle était nourrice de Lug, fils de Scal le muet. C’est elle qui demanda à son mari de défricher la forêt de Cuan pour qu’on tint une assemblée autour de son tombeau. Puis elle mourut aux calendes d’août. Sa plainte et ses jeux furent célébrés par Lugaid, d’où nous disons Lugnasad » (Dindshenchas de Rennes)

Il est clair que la divinité dont on recherche les faveurs a un caractère chtonien. Le nom même de Tailtiu est caractéristique : Tailtiu, génitif Tailten, remonte à *Talantio, dérivé du même terme que talamh, le terme courant pour la terre en irlandais : *tala-mo, génitif talmhan, *talamon(os) : la racine est Tal-. Tailtiu et Trogan, nom de la terre au sens très précis de « productrice », sont synonyme.
« Trogan est évidemment la productrice, la terre féconde, tandis que talamh est le sol, la force de la terre. Il n’y a donc aucun doute que le mois d’août n’ait été, chez les anciens Irlandais, le mois consacré à la Terre-Mère. » (J. Loth)

Sa correspondance indienne est la fête de Tîj, célébrée au mois d’août, et consacrée à la déesse Pârvatî, la puissance de procréation. Aspect spatial, permanent et paisible, Pârvatî, la Fille-de-la-Montagne-Polaire (l’axe du monde) de laquelle jaillit l’énergie terrestre, est une aimable déesse.
Nous discernons donc en Talantio beaucoup plus qu’une simple déesse éponyme : Talantio est l’Irlande concentrée en un point que nous appellerions volontiers l’Omphalos royal, le centre de la terre, l’axe du monde

Cette garantie est particulièrement fiable : epo- et ashva- désignent bien le cheval, en gaulois et en sanskrit. De même meduos s’identifie à medha. Le gaulois -meduos qui veut dire « en morceau » évoque, tout comme le mot sanskrit , l’idée de sacrifice.
« …Il existe dans la partie septentrionale la plus éloignée de l’Ulster, près de Kennelcunnil, une peuplade accoutumée, par un rite barbare, à se donner un roi de la façon suivante : toute la population s’étant rassemblée au même endroit, on amène au milieu de l’assistance une jument blanche. Et celui que l’on va élevé à la dignité de prince s’unit à l’animal. La jument est tuée aussitôt après et cuite par morceaux dans l’eau qui servira de bain au roi. Tout en se baignant il mange les morceaux de viande qu’on lui présente. Cela accompli, sa souveraineté et son autorité sont consacrées. » (Giraud de Cambrie)

Cette description, bien qu’inversée par rapport à l’Ashvamedha indien (en Inde c’est la reine qui s’accouple symboliquement avec un étalon) est conforme aux préceptes celtes qui veulent que se soit la Terre-Mère qui octroie la souveraineté au futur prince en lui faisant « l’amitié de sa cuisse ».
Ce sacrifice, enchaînant symboliquement les principes Terre-Mère, Lune-Eau, Sexualité-Fertilité, Végétation-Renouveau périodique permet de découvrir qu’aux fils des temps les divinités chtoniennes deviennent, dans les civilisations de cultivateurs, des divinités agraires. Le cheval ne fait pas exception à la règle. A Rome, lors de l’October equus, on sacrifié, au lendemain des récoltes un cheval dédié à Mars. Sa tête était garnie de grains en remerciement de la moisson engrangée tandis que la queue de l’animal était portée à la maison du roi avec grande célérité.
En Celtie, c’est Maria Talantio la déesse Terre, la Jument-blanche qui assure par son sacrifice la pérennité et le bien-être matériel de son peuple. La commémoration perpétuelle et les jeux funèbres, les courses de chevaux, le marché, les concours de poésie sont la garantie et la contrepartie de ce bien-être. La non-célébration de la fête est une cause de calamité et c’est au prince régnant de veiller à ce que rien de tel ne se produise.

Voilà pourquoi en ce jour on prie, non pas le dieu Lugus, mais la déesse Maria Talantio, la « Plus-grande-Terre », mère nourricière de Lugus.
« Ce fut Lughaid à la longue main qui créa le premier l’assemblée de Tailtiu en commémoration annuelle de sa propre nourrice Tailtiu, fille de Maghmor et femme d’Eochaid, fils d’Erc, dernier roi des Fir Bolg comme nous l’avons dit plus haut, quand Tailtiu eut été ensevelie par Lughaid sous cette colline il fonda la foire de Tailtiu en souvenir d’elle. C’est pour cette raison qu’on appela Lughnasadh, c’est-à-dire nasadh ou commémoration de Lugh. » (History of Ireland)

En résumé les relations de Lugus et de Talantio s’inscrivent dans le cadre d’une fête royale obligatoire, protectrice, garantissant la paix et l’abondance.

Cette assemblée, selon les dates retrouvées sur la Table de Coligny, elle-même, durait très précisément dix-neuf jours.
 

 Résumons les  différentes  hypothèses  rassemblées  par  Gaël  Hily  à  propos  de l’étymologie  du nom  Lug  en  ajoutant  quelques  remarques  utiles à  notre propos.

 

−  Le  nom  serait  dérivé  du  celtique  *lugion  «  serment  »  lui-même  dérivé  de  l’indoeuropéen  *leugʰ-  /  lugʰ  «  prêter  un  serment  ».  À  rapprocher  du  vieil  irlandais  luige.  Le théonyme  Lug-  étant  un  thème  en  –  u,  il  ne  peut  être  apparenté  au  nom  verbal  luige qui  est  un  thème  en  -io,  que  si  tous  deux  sont  issus  d’une  racine  *lug-.  Le  mot  gallois correspondant  est  llw  «  serment  ».  On  a  donc,  en  gallois  comme  en  irlandais,  une homonymie  entre  le  mot  signifiant  serment,  le  nom  du  dieu  et  le  mot  signifiant lumière.  Il  pourrait  s’agir  encore  une  fois  d’un  très  ancien  jeu  de  mots.  La  formule finale  de  la  défixion  de  Chamalières  utilise  sans  doute  trois  fois  en  ce  sens  un  verbe  à l’impératif  singulier  et  la  dernière  fois  l’aoriste  :  LUGE  DESSUMMIIIS,  LUGE DESSUMMIIIS,  LUGE  DESSUMMIIIS,  LUXE.  Selon  P.  Y.  Lambert,  le  thème  *lug- signifierait  «  brûler  »,  mais  l’irlandais  losc  et  le  gallois  llosgi  «  brûler  »  qu’il  donne comme  apparentés  semblent  lointains.  Sa  traduction  («  brûler  »,  «  méhaigner  ») cherche  surtout  à  donner  un  sens  vraisemblable  à  la  formule  et  reste  peu convaincante.  La  question  est  de  savoir  ce  qu’un  serment  au  sens  où  on  l’entend d’habitude  vient  faire  dans  une  malédiction.  Il  semble  possible  et  nécessaire  de supposer  un  sens  plus  général  d’invocation  du  divin  qui  comprend  aussi  bien  le serment  que  l’imprécation,  la  malédiction.  Lugus  serait  en  ce  cas  «  l’Imprécateur  » aussi bien que  «  le  Juge  » ou «  le  Juré  ».  

 

 

 

−  Le  nom  serait  apparenté  au  gaulois  lugo-  «  sombre,  obscur,  corbeau  »,  à  rapprocher d’une  racine  protoceltique  *lug-  elle-même  dérivée  de  l’indo-européen  *leug-  «  noir  ».

 Il s’agirait  d’un  jeu  de  mots.  Il  est  probable  que  «  le  Noir  »  désignait  au  sens  figuré  le corbeau  (branos)  qu’on  préférait  ne  pas  nommer  directement,  de  même  que  «  le  Brun  » désigne  l’ours  dans  les  langues  germaniques.  

Une  remarque  du  pseudo-Plutarque  sur la  fondation  gauloise  de  Lougoudounon  sous  le  signe  des  corbeaux  suggère  que  le  nom Lugus  a  pu  effectivement  avoir  pris  le  sens  de  «  corbeau  »  pour  les  Gaulois,  en  tout cas  dans  un  contexte  religieux  où  il  agit  en  tant  qu’oracle.  

Le  fait  que  les  langues celtiques  insulaires  ne  connaissent  pas  ce  sens,  malgré  le  fait  que  les  théonymes  Lugh en  irlandais  et  Llew  en  gallois  se  sont  perpétués,  peut  indiquer  que  le  nom  a  été resémantisé  assez  tardivement  en  Gaule  pour  prendre  le  sens  (figuré)  de  «  corbeau  ».

Le  sens  propre  «  noir,  obscur  »  est  quant  à  lui  quasiment  exclu  parce  que  son  usage  en tant  que  nom  de  ville  serait  trop  peu  valorisant.ar  son  nom,  est  en  réalité  le  maître  des  lumières  célestes.  Plus  encore  que  le  soleil tricéphale  qui  voit  tout,  la  lumière  du  soleil,  de  la  lune  et  des  étoiles  est  le  témoin universel  de  toute  prestation  de  serment.  Notons  pour  finir  que  la  racine  indoeuropéenne  *leuk-  «  clair,  brillant  »  produit  en  sanskrit  lóka  («  le  monde  »)  ainsi  que lokáh  («  espace  libre  »).  Elle  est  probablement  à  l’origine  du  latin  lucus,  «  bois  sacré  » qui  désigne  des  lieux  de  cultes  italiques.  Par  ces  connotations,  Lugus  peut  être  donc  à la  fois  «  le  Lumineux  »  et  celui  qui  est  vénéré  dans  la  lumière,  l’«  espace  »  sacré  qu’il incarne  aussi lui-même.

 

 

 

−  On  peut  aussi  le  rapprocher  de  la  racine  indo-européenne  *leugh-  «  placer,  mettre  ».  Ce thème  verbal  en  -u  bien  attesté  dans  les  langues  celtiques  a  les  sens  «  subir,  lâcher, libérer  ;  charger,  consommer,  manger  ».  Luxtos  est  le  nom  d’un  potier  gaulois  sur l’inscription  de  La  Graufesenque  («  chargement,  fournée  »  ou  «  chargeur  »  ?)  et luxtodos  signifie  «  chargé,  enfourné  ».  Ces  différentes  significations  convergent  dans l’idée  de  «  mettre  en  place,  mettre  en  ordre  »,  une  notion  qui  sied  bien  à  Lugh  en  tant qu’organisateur  de  la  société  et  de  l’espace  auquel  il  donne  un  centre  quand  il  lance  la pierre  de  Fál  «  au  milieu  de  la  maison  royale  »,  voire  même  en  tant  que  créateur.  Ce sens  est  assez  proche  du  nom  de  l’ébrancheur  du  pilier  des  Nautes  :  Smertrios  («  le Pourvoyeur  »)  

 

 −  En  irlandais,  lug  signifie  également  «  lynx  »  (lugos  en  protoceltique),  peut-être  de «  lumière  »  à  cause  de  la  vue  perçante  de  ce  fauve.  Cependant,  les  noms  irlandais  et gallois  du  lynx  se  rattachent  à  la  racine  i-e.  *wlkwo-  «  loup  »,  qui  se  retrouverait  dans de  nombreux  anthroponymes gaulois (Lucus,  Lucius,  Lucco,  Locco...). 

 

−  Lugus  au  sens  de  «  le  Lumineux  »  serait  dérivé  de  l’indo-européen  *leuk/g-  «  briller  » qui  a  donné  aussi  lux  en  latin.  Cette  dérivation  est  très  largement  répandue,  mais contestée,  car  l’indo-européen  *-k-  ne  produit  jamais  *-g-  en  celtique.  

Néanmoins,  la force  de  cet  argument  me  semble  diminuée  du  fait  que  la  graphie  hésite  entre  sourdes et  sonores  sur  de  nombreuses  stèles  des  Celtibères  :  on  a  lucos  à  côté  de  lugos.  sans qu’il  soit  possible  de  décider  quelle  est  la  forme  authentique.  L’alphabet  lépontique  ne distingue  pas  d’ailleurs,  entre  le  VIIIe  et  le  Ve  s.  A.C.,  les  consonnes  sourdes  des sonores  en  les  transcrivant  pareillement  P,  T,  K,  ce  qui  indique  que  cette  opposition ne  semble  pas  pertinente  pour  distinguer  le  sens  des  mots.  La  difficulté  tombe également  si  comme  Françoise  Baader  le  propose,  la  lumière  est  *leu-  en  indoeuropéen.  

Il  est  possible  en  outre  de  supposer  un  emprunt  au  grec  leukos  («  clair, blanc  »)  qui  aurait  subi  l’attraction  du  mot  signifiant  «  serment  »  (voir  plus  bas)  pour faire  un  jeu  de  mots.  Le  sens  le  plus  populaire  du  nom  est  donc  «  le  Brillant  »  ou  «  le Lumineux  »  (lucidus  mons  dans  une  glose  d’un  texte  de  Juvenal).  Llew,  le  nom  de  Lugus en  gallois,  signifie  aussi  «  lumière  »  dans  cette  langue.  

Sergent  remarque  que  ce  mot ne  signifie  «  soleil  »  dans  aucune  langue  celtique  :  du  radical  *leu-g(h)  est  dérivé  le  mot pour  dire  «  lune  »  en  breton  (loar),  en  gallois  et  en  cornique  ;  le  nom  de  celle-ci  en vieil  irlandais  (lúan  ou  lón)  est  dérivé  de  *louksnâ.  Et  le  mot  lauxnos  signifie  «  étoiles  » en vieux prussien. L’auteur en conclut que Lugus, solaire par son apparence et lunaire par  son  nom,  est  en  réalité  le  maître  des  lumières  célestes.  Plus  encore  que  le  soleil tricéphale  qui  voit  tout,  la  lumière  du  soleil,  de  la  lune  et  des  étoiles  est  le  témoin universel  de  toute  prestation  de  serment.

 

 Notons  pour  finir  que  la  racine  indoeuropéenne  *leuk-  «  clair,  brillant  »  produit  en  sanskrit  lóka  («  le  monde  »)  ainsi  que lokáh  («  espace  libre  »).  Elle  est  probablement  à  l’origine  du  latin  lucus,  «  bois  sacré  » qui  désigne  des  lieux  de  cultes  italiques.  Par  ces  connotations,  Lugus  peut  être  donc  à la  fois  «  le  Lumineux  »  et  celui  qui  est  vénéré  dans  la  lumière,  l’«  espace  »  sacré  qu’il incarne  aussi lui-même.

 

Le  nom  serait  dérivé  du  celtique  *lugion  «  serment  »  lui-même  dérivé  de  l’indoeuropéen  *leugʰ-  /  lugʰ  «  prêter  un  serment  ».  À  rapprocher  du  vieil  irlandais  luige.  Le théonyme  Lug-  étant  un  thème  en  –  u,  il  ne  peut  être  apparenté  au  nom  verbal  luige qui  est  un  thème  en  -io,  que  si  tous  deux  sont  issus  d’une  racine  *lug-.  Le  mot  gallois correspondant  est  llw  «  serment  ».  On  a  donc,  en  gallois  comme  en  irlandais,  une homonymie  entre  le  mot  signifiant  serment,  le  nom  du  dieu  et  le  mot  signifiant lumière.  

Il  pourrait  s’agir  encore  une  fois  d’un  très  ancien  jeu  de  mots.  La  formule finale  de  la  défixion  de  Chamalières  utilise  sans  doute  trois  fois  en  ce  sens  un  verbe  à l’impératif  singulier  et  la  dernière  fois  l’aoriste  :  LUGE  DESSUMMIIIS,  LUGE DESSUMMIIIS,  LUGE  DESSUMMIIIS,  LUXE.  Selon  P.  Y.  Lambert,  le  thème  *lug- signifierait  «  brûler  »,  mais  l’irlandais  losc  et  le  gallois  llosgi  «  brûler  »  qu’il  donne comme  apparentés  semblent  lointains.  Sa  traduction  («  brûler  »,  «  méhaigner  ») cherche  surtout  à  donner  un  sens  vraisemblable  à  la  formule  et  reste  peu convaincante.  La  question  est  de  savoir  ce  qu’un  serment  au  sens  où  on  l’entend d’habitude  vient  faire  dans  une  malédiction.  Il  semble  possible  et  nécessaire  de supposer  un  sens  plus  général  d’invocation  du  divin  qui  comprend  aussi  bien  le serment  que  l’imprécation,  la  malédiction.  Lugus  serait  en  ce  cas  «  l’Imprécateur  » aussi bien que  «  le  Juge  » ou «  le  Juré  ».  

 

−  On  peut  aussi  le  rapprocher  de  la  racine  indo-européenne  *leugh-  «  placer,  mettre  ».  Ce thème  verbal  en  -u  bien  attesté  dans  les  langues  celtiques  a  les  sens  «  subir,  lâcher, libérer  ;  charger,  consommer,  manger  ».  Luxtos  est  le  nom  d’un  potier  gaulois  sur l’inscription  de  La  Graufesenque  («  chargement,  fournée  »  ou  «  chargeur  »  ?)  et luxtodos  signifie  «  chargé,  enfourné  ».  Ces  différentes  significations  convergent  dans l’idée  de  «  mettre  en  place,  mettre  en  ordre  »,  une  notion  qui  sied  bien  à  Lugh  en  tant qu’organisateur  de  la  société  et  de  l’espace  auquel  il  donne  un  centre  quand  il  lance  la pierre  de  Fál  «  au  milieu  de  la  maison  royale  »,  voire  même  en  tant  que  créateur.  Ce sens  est  assez  proche  du  nom  de  l’ébrancheur  du  pilier  des  Nautes  :  Smertrios  («  le Pourvoyeur  »)    

 

−  En  irlandais,  lug  signifie  également  «  lynx  »  (lugos  en  protoceltique),  peut-être  de «  lumière  »  à  cause  de  la  vue  perçante  de  ce  fauve.  Cependant,  les  noms  irlandais  et gallois  du  lynx  se  rattachent  à  la  racine  i-e.  *wlkwo-  «  loup  »,  qui  se  retrouverait  dans de  nombreux  anthroponymes gaulois (Lucus,  Lucius,  Lucco,  Locco...). 

 

 

 


29/10/2015