MYTHOLOGIES

MYTHOLOGIES

Merlin

 

Aldan mère de merlin/Myrdynn qu'elle conçoit sans père.  Plus tard il sera dit que son père est un incube  et démon  des eaux: Morfrynn.

Aldan par la suite donne une demi soeur à Merlin/Myrdynn en épousant Morvhyn: Gwendydd qui va epouser Rydderch dont la soeur Gwendollyn  va epouser Merlin/Myrdynn  qui divorcera quand il deviendra fou pour la libérer.

 

 Merlin est fusion des personnages d'Ambrosius (Aurèle Ambroise) que l'on nomme aussi Emrys dans les recits Gallois et de Myrddin appelé aussi Emrys

 

 

Comment retrouver, à partir des textes médiévaux, la cohérence mythique du personnage de Merlin ? Que peut-il rester au Moyen Âge d’une figure archaïque remontant à la vieille culture celte ?

Sans celtomanie excessive, on rappellera d’emblée l’identité celte de l’enchanteur indispensable à son interprétation mythique. Dans les textes médiévaux (gallois et français), l’histoire de Merlin se déroule toujours dans des régions où des langues celtiques continuent de se parler au Moyen Âge. Par exemple, le nom de Merlin est éponyme d’une ville galloise Caermarthen où l’on parlait évidemment le gallois. D’ailleurs un clerc gallois nommé Geoffroy de Monmouth écrit en latin une Vie de Merlin achevée entre 1148 et 1155. Cette Vita Merlini reste un témoignage essentiel sur la préhistoire mythique d’un personnage qui est d’abord indépendant de la légende d’Arthur. On sait enfin que Viviane fait disparaître magiquement Merlin dans la forêt de Brocéliande, autre région où l’on a jadis parlé une langue celtique (le breton armoricain), si l’on admet l’identification discutée de la forêt de Brocéliande à celle de Paimpont mais, en la matière, l’autorité de Chateaubriand est quand même considérable.

L’existence dans les romans d’une toponymie et d’une onomastique celtiques ajoutée au fait qu’il existe toute une littérature galloise sur le personnage de Merlin constitue une forte présomption sur l’origine celtique (brittonique) de l’enchanteur. Comme on sait par ailleurs que les écrivains français du Moyen Âge n’inventaient pas les récits qu’ils racontaient mais puisaient leur matière dans un folklore oral d’origine insulaire, on peut voir en Merlin l’avatar médiéval d’une divinité des Celtes insulaires. En plus d’un millénaire, ces antiques divinités ont eu le temps d’évoluer vers des figures de contes folkloriques dont la transmission a longtemps été essentiellement orale. C’est justement sous cette forme qu’ils sont recueillis par écrit aux xiie et xiiiesiècles par des écrivains qui vont ainsi les fixer pour la postérité, non sans leur avoir imprimé au passage une marque nouvelle mais le substrat mythique ancien survit sous la patine romanesque, à la fois courtoise et chrétienne.

Merlin Protée

Deux domaines peuvent être explorées pour vérifier le postulat que les aspects les plus archaïques de Merlin peuvent remonter à une antique divinité des Celtes. Grâce à l’iconographie archéologique, les descriptions littéraires de Merlin peuvent être confrontés à des représentations de divinités celtes. D’autre part, l’étymologie et la mythologie comparées permettent d’étudier des analogues de Merlin dans d’autres cultures européennes relevant du même héritage indo-européen. L’idéal est évidemment d’obtenir le croisement parfait de l’ensemble des données iconographiques, étymologiques et mythologiques.

L’étymologie du nom de Merlin est discutée. On retient tantôt *mori-dunum signifiant « forteresse de la mer » (mais pourquoi Merlin serait-il une forteresse à moins de comprendre qu’il habite dans une forteresse sous la mer donc qu’il est une créature de la mer ?), tantôt un adjectif gallois *morij :n signifiant « le maritime ». Les deux étymologies soulignent l’appartenance du personnage à la mer et ne sont pas si éloignées l’une de l’autre. En effet, le nom de Merlin ne ressemble sans doute pas par hasard à des noms de poisson : le merlan, le merlu, le marlin qui sont autant de créatures marines. Cette étymologie en ferait alors l’équivalent du dieu éponyme de l’île de Man Manannan, fils de Lyr (c’est-à-dire fils de l’Océan) qui apparaît dans les Mabinogion sous le nom de Manawyddan vab Llyr.

Les traits essentiels de Merlin (ses dons de métamorphose accompagnant ses dons de prophétie) s’expliqueraient par cette origine marine. Pour bien en comprendre l’importance, il suffit de se rappeler le personnage de Protée dans l’Odyssée d’Homère (chant IV, vers 450 et suiv.). Protée est le Vieux de la Mer, l’être primordial (son nom vient du grec prôtos signifiant « le premier »). Doué de pouvoirs de prophétie et de métamorphose (comme Merlin précisément), Protée est le gardien du troupeau des monstres marins. Il n’accepte de prophétiser que sous la contrainte après avoir pris des formes effrayantes et évanescentes.

5En tant que Protée celte, Merlin peut théoriquement prendre toutes les apparences à l’instar de Taliesin, modèle de tous les bardes gallois avec lequel il est d’ailleurs parfois confondu. On peut placer ces métamorphoses dans un cycle déterminé dont la tradition iranienne donne un ééquivalent

 Le dieu Verethraghna présente une dizaine d’apparences différentes qui correspondent à l’initiation d’un jeune homme qui doit devenir un chef de guerre à sa puberté : dans l’ordre, ces apparences sont le Vent, le Taureau, le Cheval, le Chameau, le Sanglier, le Jeune Guerrier, le Corbeau, le Bélier, le Bouc, l’Homme dans la force de l’âge. Françoise Bader a rapproché ces dix incarnations divines des dix comparaisons précédant la revue des forces grecques et troyennes avant la guerre de Troie.

On peut supposer alors que Merlin ait pu connaître un cycle de métamorphoses identiques à celles qui se trouvent dans l’hymne persan.

6Merlin est un véritable Protée celtique. Ses dons de métamorphose l’apparentent au Protée hellénique mais si les deux créatures se ressemblent, ce n’est pas en vertu d’une imitation consciente du personnage grec par les écrivains médiévaux. Cette similitude s’explique plutôt par un héritage culturel commun qui remonte à la période dite indo-européenne mais qui intègre probablement des éléments encore plus archaïques relevant du chamanisme eurasiatique : on songe au motif du vol aérien de devins comme Suibhne (analogue irlandais de Merlin) qui connaît les lévitations ou ascensions chamaniques.

La croyance en une transformation du chamane en certains animaux (et le cerf en fait partie) remonte au moins au paléolithique. Une représentation célèbre en témoigne. La grotte de Montesquieu-Avantes dans l’Ariège possède sur ses parois l’image d’un cerf humanisé qui se dresse sur ses pattes arrière. Ces pattes ressemblent fort à des jambes humaines. On se trouve donc au moment fatidique qui voit l’entrée de ce « sorcier » dans l’étape ultime de sa transformation en animal. Une scène identique se retrouve en Afrique du Sud où un chamane se transforme en rhebuck (« antilope ») sur les parois des grottes du Drakenberg (on date ces scènes de l’art Buschman, soit 6 000 ans avant notre ère). Mais que révéle la métamorphose de l’homme en animal sinon l’initiation préalable à un savoir suprême sur les avatars du corps ? L’acquisition de ce savoir fait aussi l’objet de contes ou de mythes.

 


26/04/2017